J’ouvre les yeux. Quelqu’un me regarde. Assis sur un squelette de Triumph Bonneville sans roue. Il sourit. C’est M., l’ami gourou, sympathisant de moto. Je sens qu’il comprend mon état. Il lève le bras. M’indique-t-il un chemin à suivre? Pourquoi suivre une autre route? La musique est la voie à suivre. C’est ce que je viens de comprendre, lui dis-je. Que non, rétorque-t-il. La liberté, c’est filer droit devant, ne jamais se laisser diriger. Je sens le poids de son regard et toutes ces questions qui surgissent de partout.
Et quand je dis de partout…..
Pourquoi mon corps qui vibre? Pourquoi ces halos qui irisent tout ce qui m’entoure? Pourquoi les objets semblent-ils posséder leur vie propre? Quelle est cette lumière qui semble venir de ce regard lourd et lointain? Va-t-elle m’atteindre? D’où viennent ces pensées qui m’assaillent? Sont-elles miennes? Que veulent dire ces sourires? Apaisement? Connivence? Complicité?
Oui, ce doit être cela. Mon moi-même plein de lumières qui revient. Voilà mes pensées en pleine farandole. Joie indicible. Plus besoin de m’exprimer. Tout est dans tout. Ton sourire, mon sourire. Ton regard, mon regard. Tes pensées, mes pensées.
Il y a ma mâchoire qui se crispe. J’esquisse un bâillement pour retrouver la sensation du sourire d’il y a…. si longtemps. La vibration qui revient et s’accentue… Le salon où nous nous trouvons n’offre plus les garanties de la géométrie euclidienne. Étais-je assis ou debout? Les murs rejoignent-ils le plafond? Y a-t-il un plafond?
Mon accompagnateur, R , me parle. Que des sons lointains, incompréhensibles. Il me dirige vers un canapé. Où nous nous assoyons. Son intervention semble avoir atténué un tant soit-il mes sensations physiques?
Je scrute la pièce qui a retrouvé ses dimensions à peu près normales. Je demande si cela est terminé maintenant. Tous se regardent avec le sourire aux lèvres d’où sort maintenant une cascade de rires…. Pourquoi cette hilarité générale? Chaque son émis prend vie et virevolte dans ma direction. Pourquoi vers moi? Quand soudain il y a mes pensées qui prennent le chemin inverse. Elles se dirigent vers tout un chacun. Ou est-ce le contraire? Qu’est-ce que je comprends maintenant? Que je n’aurai plus jamais rien à cacher. Sentir le vide qui prend toute la place au creux de mon estomac, jusqu’au bout de mes tripes.
Tout semble se figer. Une grande respiration, mon regard qui implore. Laissez-moi mes illusions, ma réalité, déformée par les demi-vérités dont je me suis nourri depuis si longtemps. Et ça repart. Tout se désagrège. Effritement continu, parcelle par parcelle, vers ce gouffre qui semble tout attirer. Maelstrom aux antipodes des élévations ressenties dans ces cosmos neuronales. Il faut revenir comme avant. Ai-je encore un avant? À la recherche de pensées qui soient réellement miennes. Je suis assis sur le sofa, je suis en larmes.
Toujours sur son squelette de moto, M me dévisage. Il me lance:‘’ Musique ou liberté. Pour les deux il faut vivre et ne penser que par la vérité. Maintenant tu peux connaître le sens de STP sur le buvard. Sauve Toi Pas.’’ Suivi d’un grand éclat de rire. Une parcelle de compréhension, enfin.
R me réconforte comme il peut. Il décide de me faire prendre l’air. Nous sortons. Bouger me fait du bien. Être moins entouré semble m’apaiser. Nous décidons qu’en revenant j’écouterai un peu de musique. R me suggère ‘’I’m fixing a Hole’’ des Beatles.
Prémonitoire
Fixing A Hole »
I’m fixing a hole where the rain gets in
And stops my mind from wandering
Where it will go
I’m filling the cracks that ran through the door
And kept my mind from wandering
Where it will go
And it really doesn’t matter if
I’m wrong I’m right
Where I belong I’m right
Where I belong
See the people standing there
Who disagree and never win
And wonder why they don’t get in my door
Installé devant le petit pickup, ce fut la lente remontée. Récupérer mes justes perceptions, remplir le creux au fond de mes tripes. Cette première expérience psychédélique en fut toute une. Hallucinations multiples, extases, paranoïa, expérience extra-sensorielle, conscience exacerbée aux confins de l’inconscient collectif. Ce fut aussi un exposé que je fis pour mes cours de philo. Mes profs semblèrent apprécier. Ce qui m’aura permis aujourd’hui de pouvoir me remémorer et de le partager.
En conclusion, toujours être accompagné quand vous tentez de nouvelles expériences pouvant comporter des dangers. Tout cela dura une douzaine d’heures.
Toute ressemblance avec des personnes vivantes ou décédées n’est pas fortuite. Si jamais vous vous reconnaissez, faites-moi signe. Vous pourriez ajouter vos souvenirs aux miens.
Époque bien révolue, à moins qu’un nouveau Timothy Leary se lève. Jamais je ne toucherai aux camelotes bâclées qui circulent de nos jours.
By: Le retour du Flying Bum on 2022/06/26
at 8 h 55 mi
Il y a les thérapies avec micro-doses de LSD.
https://elixir.qc.ca/consommation-de-spa/le-microdosing-de-lsd/
À Berkeley dans les années 70, j’ai pu rencontrer une psychologue qui avait accès à du LSD clinique.
Tout un monde de différences. Peut-être un futur article sur le côté plus « Turn on, Tune in and Drop out ». Expérience vécue sur la plage de Big Sur.
By: Jacques Grégoire on 2022/06/26
at 13 h 48 mi